Avant la Coupe du Monde, Cœurs de Foot vous fait (re)découvrir quelques unes des joueuses majeures de la planète football. Elles sont attendues pour mener leur équipe le plus loin possible dans ce Mondial 2019 disputé en France et seront suivies de près à chacune de leurs sorties dans ce tournoi.

Il y a mille et une manière de connaître Megan Rapinoe. Pour les fans de football, l'attaquante américaine est d'abord une immense championne. Elle s'est également fait connaître pour ses prises de positions fortes, dans un paysage sportif américain où les athlètes sont de plus en plus nombreux à s'engager publiquement.

 

Pour sa première Coupe du Monde en 2011, Megan Rapinoe entre déjà dans la légende. Si les États-Unis échouent cet année-là en finale du tournoi, les supporters américains se souviennent probablement de ce match face au Brésil en quart de finale.

 

Dans les mémoires

Quatre plus tôt, le Brésil avait signé une victoire retentissante (4-0) en demi-finale face aux États-Unis, une rencontre qui avait participé à propulser la Brésilienne Marta au rang de superstar. Face à la Seleçao, la sélection américaine se retrouve à nouveau dans les cordes en Allemagne, menée au score (2-1) alors qu'on se rapproche de la fin de la prolongation.

Dans les dernières secondes du match, un ballon récupéré par la défense américaine se transforme en attaque rapide et presque désespérée. Carli Lloyd transmet pour Rapinoe côté gauche, et son centre vient trouver au second poteau la tête d'Abby Wambach qui surgit pour égaliser dans le money time.

Les États-Unis l'emporteront ensuite aux tirs au but, dans un match qui contribuera à forger la réputation des Américaines d'implacable machine à gagner, avec Megan Rapinoe propulsée parmi les premiers rôles. Parmi ces matches entrés dans l'inconscient collectif, on peut aussi citer cette demi-finale olympique en 2012 à Old Trafford face au Canada de Christine Sinclair.

Un match que le Canada aurait probablement dû gagner, mais le doublé de Megan Rapinoe participe à la victoire américaine, arrachée au bout de la prolongation par Alex Morgan. Avec cette médaille d'or olympique, Pinoe remporte à Londres son premier titre majeur, alors que des blessures avaient retardé son émergence en équipe nationale.

 

Le Monde après l'Olympe

A l'occasion de ce tournoi, Rapinoe déploie des qualités qui font encore aujourd'hui ses forces, avec notamment une qualité de frappe pied droit, qu'elle met à contribution sur coup de pied arrêté ou sur des frappes à mi-distance. Laisser de l'espace à Megan Rapinoe aux abords de la surface, cela revient à prendre un risque inconsidéré, comme ont pu notamment le constater Karen Bardsley (Angleterre) et Lydia Williams (Australie) lors de leurs derniers matches face aux États-Unis.

En 2015, les États-Unis remportent la Coupe du Monde au Canada et Megan Rapinoe fait partie des joueuses qui ont participé à lancer la machine, avant le show Carli Lloyd en finale. C'est notamment elle qui marque le premier but des États-Unis dans ce tournoi, inscrivant un doublé face à l'Australie.

Sur le toit du monde avec les États-Unis, Megan Rapinoe a également connu nombre de finales perdues. En Coupe du Monde en 2011, mais aussi avec son club du Seattle Reign en NWSL (2014 et 2015) ou lors de son double-passage à Lyon avec qui elle dispute la finale de la Champions League en 2013 face à Wolfsburg. Même dans la défaite, Megan Rapinoe fait partie de ses joueuses capable de marquer les esprits, par un geste, un but une fulgurance.

 

Les combats d'une équipe

Un parcours marqué également par des blessures et notamment celle que Rapinoe subit en décembre 2015. Alors qu'elles effectuent leur Victory Tour après leur sacre au Mondial canadien, les joueuses de Jill Ellis sont à Hawaii pour leur dernier match de la tournée face à Trinidad & Tobago. Lors d'un entraînement, Megan Rapinoe est victime d'une déchirure du ligament croisé antérieur (genou droit).

Une blessure qui réveille les critiques des joueuses étasuniennes contre les pelouses synthétiques source de polémique lors du Mondial au Canada. Le match du lendemain face à Trinidad est finalement annulé sous la pression des joueuses, étant lui aussi programmé sur un terrain artificiel.

Cet épisode douloureux pour Megan Rapinoe, illustre également la résolution des internationales américaines. Dans les mois qui suivent, elles lanceront une première procédure contre la fédération des États-Unis, une démarche relancée cette année avec la plainte pour discrimination déposée par 28 internationales contre l'USSF.

 

Un genou à terre

Pleinement impliquée dans cette démarche, Megan Rapinoe n'hésite pas à prendre position sur d'autres sujets. Après avoir rendu publique son homosexualité en amont des Jeux Olympiques de 2012, l'attaquante américaine revendique régulièrement son activisme en faveur des droits des LGBTI. Elle forme d'ailleurs, un power couple avec sa compagne Sue Bird, quadruple médaillée d'or olympique, et l'une des références du basket outre-Atlantique.

Elle s'est également fait connaître lorsqu'elle décide de poser un genou à terre au moment où résonne l'hymne national américain. Un geste répété avec son club et en équipe nationale, et depuis interdit par un règlement introduit par la fédération US. Megan Rapinoe est alors la première athlète blanche à rejoindre le mouvement lancé par le joueur de football américain Colin Kaepernick, avec l'objectif de mettre publiquement en cause les brutalités policières et les inégalités raciales dans le pays.

Plus récemment, Rapinoe épinglait les instances internationales du football, estimant qu'il était « ridicule et décevant » que les finales de la Gold Cup et de la Copa América masculines soient programmées le même jour que la finale de la Coupe du Monde.

Des engagements qu'elle tente de retranscrire dans ses projets professionnels. En parallèle du Mondial, ce mois de juin va marquer le lancement de sa marque Re-inc, créée en commun avec Meghan Klingenberg, Tobin Heath, Christen Press, elles-aussi internationales américaines.

 

Le rêve américain version Rapinoe

Une marque de vêtements, de produits de beauté et d'entretien, de technologies... avec l'ambition de créer des produits qui se veulent « inclusifs » et avec une démarche qui remettent en cause les règles/codes du monde de la mode.Un programme ambitieux, mais qui ne constitue pas un coup d'essai puisque Rapinoe a déjà lancé sa marque de vêtements avec sa sœur jumelle, Rachael, elle-même ancienne footballeuse. Sur les vêtements, un slogan encourageant : « Be the Best You » (Sois la meilleure version de toi-même). Une volonté d'inspirer et de donner, à sa manière, l'exemple.

À bientôt 34 ans, ses engagements n'ont pourtant pas fait office de transition vers une fin de carrière. Après des Jeux Olympiques 2016 pour lesquels Megan Rapinoe est probablement revenue trop tôt à la compétition après sa blessure au genou, elle parvient à se relancer l'été suivant lors du Tournoi des Nations, confirmant ses bonnes prestations en club avec Seattle.

L'attaquante américaine semble alors en passe de retrouver son meilleur niveau, d'autant que l'évolution du jeu américain, avec des phases plus élaborées de possession semble en phase avec ses qualités notamment sur le plan technique. Un retour en grâce qui s'est confirmé jusqu'à aujourd'hui avec une place de titulaire, alors que Rapinoe est également co-capitaine de la sélection avec Alex Morgan et Carli Lloyd.

Une victoire américaine cet été en France devrait donc être synonyme de nouveaux coups d'éclats de Megan Rapinoe. Sur le terrain, en se montrant décisive, et en dehors avec une volonté assumée de ne pas se rendre à la Maison Blanche (elle avait rencontré Barack Obama après le titre au Canada) en cas de victoire finale. En 2015, elle avait qualifié Donald Trump « d'abruti » (jerk), une opinion qui quatre ans plus tard n'a visiblement pas changé...

 

=> [Coupe du Monde 2019] Retrouvez la présentation du Groupe F (États-Unis / Suède / Thaïlande / Chili

Hichem Djemai