Cet après-midi (13h), le club strasbourgeois de l'AS Pierrots Vauban va disputer son premier match de la saison face à l'ASPTT Albi. Disqualifiée des barrages d’accession à la D2 suite à une réclamation de l'AS Beauvais Oise, l'AS Pierrots Vauban est parvenue à obtenir une place au soleil dans le groupe B au terme d'une bataille juridique menée pendant tout l'été. Un marathon sur lequel nous sommes revenus avec Freddy Rump le président de la section féminine du club alsacien.

 

Épisode 1 – Jusqu'ici, tout allait bien...

Avant cette phase d'accession vers la D2, l'AS Pierrots Vauban faisait partie des équipes bien placées pour se hisser en D2. Une ambition que nous avait d'ailleurs fait partager les joueuses et le staff, lorsque nous les avions rencontrés au Havre en Coupe de France. Issues de la Ligue du Grand Est, les joueuses strasbourgeoises se présentaient face à Beauvais pour le premier tour de la phase d'accession nationale après avoir remporté leur championnat régional et la Coupe d'Alsace.

Un premier tour maîtrisé, puisque l'AS Pierrots Vauban s'impose 1-0 à domicile lors du match aller (28 mai), avant de s'envoler dans l'Oise au match retour avec un nouveau succès sur le score de 4-0 (3 juin). Dans les buts alsaciens, on retrouve Sydney Drinkwater, arrivée en janvier au club depuis les États-Unis, après avoir connu différentes expériences dans le football universitaire américain. Si elle ne laisse rien passer pendant les deux rencontres, sa présence sur le terrain va entraîner la disqualification de l'AS Pierrots Vauban suite à une réclamation de l'ASBO.

 

Épisode 2 – Vous avez reçu un e-mail

Dans la semaine qui suit le match retour face à Beauvais, le club apprend que le deuxième tour face à Saint-Denis n'aura pas lieu. Le club reçoit alors « un e-mail du service juridique » avec « obligation de réponse sous 24h » comme nous le raconte Freddy Rump. En effet, le club de l'Oise a posé une réclamation concernant Sydney Drinkwater, celle-ci ne disposant pas de Certificat International de Transfert (CIT).

Un sésame théoriquement nécessaire pour une joueuse qui change de fédération d'affiliation, ici entre les États-Unis et la France. Problème, Sydney Drinkwater vient du championnat universitaire, elle était d'ailleurs coach des gardiennes des Little Rock Trojans, une équipe universitaire basée dans l'Arkansas, avant d’arriver à Strasbourg.

Pas de CIT, mais il y en avait-il besoin dans le cas de Drinkwater ? Le staff de l'AS Pierrots Vauban est pris de cours, et ne peut apporter « des preuves »  avant le week-end suivant. C'est donc Beauvais qui accueille le Racing Club de Saint-Denis pour le match aller du deuxième tour des barrages.

Strasbourg hors-course, après avoir gagné sur le terrain, un premier cas dans une phase de barrages où les réclamations vont se multiplier avec deux autres ''affaires'' lors du second tour avec des réclamations de l'OGC Nice face au Havre, et de l'AS Portet face à Orvault.

 

Épisode 3 – Oui, mais...

Éliminée suite à décision de la Commission Fédérale des Règlements et Contentieux (CFRC), l'AS Pierrots Vauban à décidé de faire appel auprès des instances de la FFF (Commission Supérieure d'Appel). Une démarche qui passe notamment par la recherche d'informations outre-Atlantique. Les contacts de Sydney Drinkwater sont mis à contribution, de même que sa famille restée aux États-Unis.

Freddy Rump évoque également la nécessité d'entrer en contact des responsables de la Fédération des États-Unis pour tenter de trouver des éléments de preuves et montrer que le club n'avait pas besoin de CIT pour signer Drinkwater en janvier dernier. Comme il nous l'explique, toute communication émanant de la fédération des États-Unis a plus de poids dans la procédure aux yeux de la FFF en comparaison avec les informations glanées via des proches de la gardienne strasbourgeoise ou ses anciens clubs.

Selon l'USSF, le dernier passage de Sydney par un club affilié à la fédération remonterait à la saison 2013/2014, mais comme nous l'explique Freddy Rump, le club de Brevard (Floride) assure « via une attestation de son président » qu'elle n'était pas « licenciée » et n'avait pas « joué dans ce club » à cette période. Entre temps, toutes ses expériences en football universitaire l'ont été dans des équipes affiliées à la NCAA mais pas à la Fédération des États-Unis de Football.

Selon Freddy Rump, c'est bien cette « trace informatique » dans les fichiers de l'USSF, d'un passage de Sydney Drinkwater dans un club fédéral il y a quatre ans qui a conduit la FFF à sanctionner l'AS Pierrots Vauban dans un premier temps. L'enjeu, montrer si la gardienne strasbourgeoise a été engagée dans un club fédéral dans les 30 mois qui ont précédé son départ vers la France, comme spécifié dans les règlements de la FIFA pour les joueuses amatrices.

Fin juin, la Commission Supérieure d'Appel donne raison à l'AS Pierrots Vauban sur le fond, malgré une audience « expéditive » et donc confirme la validité du transfert de Sydney Drinkwater. Mais cette décision ne s'accompagne pas d'une ''réparation'' souhaitée par le club à savoir, obtenir la montée en D2.

 

Épisode 4 – Chaises vides

La prochaine étape possible dans ce type de situation, c'est de saisir le CNOSF et de solliciter une conciliation auprès des instances du mouvement olympique français. Une décision qui n'a pas de valeur contraignante pour la fédération concernée, mais qui constituerait un poids supplémentaire pour l'AS Pierrots Vauban dans sa course contre la montre vers la D2.

Le jour de l'audience, le 20 juillet, les représentants de l'AS Pierrots Vauban sont bien présents mais pas ceux de la FFF, « qui ont décidé de ne pas être présents » à l'étonnement des dirigeants strasbourgeois. Une absence qui sera également le traitement réservé à Orvault qui avait saisi le CNOSF, également dans l'espoir d'une intégration en D2, après avoir été disqualifié au profit du Portet. La décision du CNOSF se révèle favorable à l'AS Pierrots Vauban, estimant légitime la demande du club de pouvoir accéder en D2.

Dans les semaines qui suivent, la FFF ne fait pas appel de la décision, mais l'avis du CNOSF ne se traduit pas encore dans les faits. L'AS Pierrots Vauban n'est donc toujours pas en D2.

 

Épisode 5 – Forcer le destin

Il a fallu un dernier coup de pouce pour parvenir enfin à l'échelon national. Pour Freddy Rump, la dernière étape décisive s'est jouée sur le terrain judiciaire. En effet, en l'absence de mouvement du côté de la FFF, le club a choisi de saisir la justice administrative. Un recours en référé avec des menaces « d'indemnités financières » qui aurait permis de faire pencher définitivement la balance en faveur d'une accession en D2, selon le président de l'AS Pierrots Vauban.

Une décision communiquée officiellement le 20 août, au dernier moment alors que les groupes et le calendrier avait déjà été établis pour la saison à venir. L'AS Pierrots Vauban se retrouve donc treizième équipe du groupe B. Un nombre impair qui fait du club strasbourgeois la première équipe exempte, puisque à chaque journée (26 au lieu de 22) une des treize équipes ne jouera pas.

Une issue positive pour le club même si cette décision favorable intervient tard, avec un impact sur la préparation mais aussi sur le recrutement en vue de la saison qui s'ouvre. Si le président peut compter sur un groupe stable par rapport à la saison dernière, malgré quelques départs, les interrogations demeurent forcément. Parmi les embûches potentielles, un groupe B à 13 qui comptera trois équipes reléguées directement en fin de saison, en plus de l'équipe qui devra passer par les barrages. Donc un peu plus de risque de redescendre à l'échelon régional.

Des difficultés potentielles envisagées avec philosophie et enthousiasme pour un club qui va découvrir la D2 cette saison. Freddy Rump se dit aujourd'hui « satisfait » et « sans amertume » même si il aurait préféré passer un « été tranquille ». Pour d'autres, le marathon n'est pas fini avec Orvault qui reste dans un entre-deux, avec une possible intégration à l'échelon supérieur, mais avec une décision qui se fait toujours attendre.

 

À suivre...

 

Photo: Marc Vervinck / Ligue Grand Est Alsace (Facebook)

Hichem Djemai