Le combat des internationales américaines pour « l'égalité des revenus » entre les sélections féminine et masculine a connu un nouveau rebondissement ces derniers jours avec l'échec de la médiation amorcée pendant la Coupe du Monde. Dans le même temps, une date a été fixée pour le procès, avec des audiences qui débuteront avant les Jeux Olympiques de Tokyo.

 

La victoire n'a pas calmé les esprits, bien au contraire. La Coupe du Monde s'achevait sous une pluie de confettis pour les joueuses américaines et la promesse d'une « médiation » relayée par les médias outre-Atlantique. On évoquait alors une démarche des avocats des internationales américaines pour se rapprocher de ceux de la fédération des États-Unis (USSF) et tenter de trouver un compromis sans passer par la case tribunal.

 

Une préparation tronquée pour les J.O ?

Une éventualité qui a tourné court puisque l'on a appris la semaine dernière que la médiation n'avait pu aboutir, avec des positions pour le moment inconciliables entre les deux parties, malgré des échanges pourtant jugés « encourageants » dans un premier temps. Une situation d'impasse qui a relancé le processus judiciaire avec désormais une date de procès fixé par un juge de Californie, l'état ou la plainte avait été déposée par les internationales américaines le 8 mars dernier.

Un procès fixé au 5 mai 2020, soit un peu plus de deux mois avant les Jeux Olympiques de Tokyo (le tournoi féminin débute le 22 juillet 2020), où les États-Unis tenteront de conquérir une cinquième médaille d'or. Un choix de date qui pourrait donc perturber la préparation de l'équipe américaine en vue des J.O, dans un contexte où l'USSF est également à la recherche d'un-e remplaçant-e pour Jill Ellis, qui va quitter son poste de sélectionneuse à l'automne prochain.

Les documents de procédure indiquent d'ailleurs que les représentants des joueuses comme ceux de la fédération avaient demandé que le procès ne se déroule pas avant l'automne 2020, avec la date du 11 novembre proposée du côté des joueuses, le 8 décembre pour la fédération. Un agenda judiciaire qui entre en collision avec celui de la sélection américaine, et qui pourrait participer à faire monter encore la pression dans les prochains mois.

 

Quand les parlementaires s'en mêlent

La victoire des États-Unis a d'ailleurs offert une nouvelle tribune aux joueuses américaines et leur revendication de « revenus égaux » (equal pay) entre les équipes masculine et féminine, et renforcer leur crédit auprès du public américain. En témoigne notamment la résonance du discours prononcé par Megan Rapinoe devant la mairie de New York, à l'issue de la parade organisée dans les rues de la ville pour honorer les championnes du monde à leur retour sur le sol américain.

Des revendications qui ont trouvé des relais politiques à l'image du projet de loi déposé par deux représentantes démocrates (équivalent des députées) et qui propose de bloquer « tout financement fédéral en faveur de la Coupe du Monde [masculine] 2026 » (co-organisée par le Canada, les États-Unis et le Mexique) tant que « la fédération (USSF) ne paiera pas [les joueuses] de l'équipe nationale des salaires justes et équitables ».

Si le projet de loi n'a pas encore réuni un nombre suffisants de soutien pour être proposé au vote, cette bataille judiciaire se décline aussi dans les sphères de Washington avec l'USSF qui s'est attachée les services de lobbyistes pour tenter de convaincre les parlementaires du caractère non-discriminatoire de sa politique vis-à-vis de l'équipe nationale féminine. Des internationales américaines qui, pour rappel, sont sous contrat et payées principalement par leur fédération et non leur club.

Malgré l'élan de sympathie provoqué par la victoire en France, l'issue d'un éventuel procès reste incertain. Même si la médiation amorcée cet été s'est révélée infructueuse, d'autres phases de négociations plus ou moins informelles devraient probablement avoir lieu d'ici au procès, d'autant que les deux parties doivent commencer à renégocier l'accord collectif (Collective Bargaining Agreement) entre les joueuses de l'équipe nationale et l'USSF, l'actuel CBA expirant en 2021.

 

Photo: Getty Images / FIFA (Megan Rapinoe, capitaine de l'équipe étasunienne et Carlos Cordeiro, le président de l'USSF fêtant la victoire des États-Unis en finale de la Coupe du Monde en France, le 7 juillet dernier à Lyon)

Hichem Djemai