Selon nos confrères britanniques du Guardian, la FIFA aurait ouvert une enquête sur des allégations de violences sexuelles et physiques envers des joueuses de l'équipe féminine d'Afghanistan. 

On savait que jouer au football quand on est une femme dans une société afghane ultra-conservatrice était très difficile. Mais les révélations récentes du quotidien britannique The Guardian font froid dans le dos. Selon le journal, la FIFA a officiellement lancé une enquête, après que plusieurs membres de l'équipe d'Afghanistan se sont plaintes d'avoir été agressées sexuellement et physiquement par des hommes de la fédération de foot du pays (AFF). Parmi les personnes accusées figure notamment le président de l'AFF Keramuudin Karim. 

Une source de la direction de la FIFA a même déclaré au Guardian qu'elle travaillait avec les Nations Unies pour garantir la sécurité de certaines joueuses durant l'enquête. «La FIFA est pleinement consciente de la situation en Afghanistan et travaille d'arrache-pied pour assurer la sécurité des filles. Ils travaillent très discrètement avec les personnes impliquées étant donné le caractère sensible des accusations et le danger pour la vie. Depuis mars, ils ont rassemblé les preuves nécessaires à une enquête formelle et ont fait appel aux Nations Unies», révèle la source.

 

"Ils promettaient aux filles 112 euros par mois si elles disaient oui à tout."

 

Les faits reprochés se seraient déroulés lors de camps d'entraînements au siège de la fédération afghane, ainsi que lors d’un rassemblement en Jordanie en janvier dernier. C'est en tout cas ce qu'a rapporté Khalida Popal pour le Guardian. Cette ancienne capitaine de la sélection nationale avait fui l'Afghanistan en 2016 suite à des menaces de mort. «Il était très difficile de vivre dans le pays et de parler car ce sont des hommes très puissants. Si une joueuse lève la voix, elle peut être tuée», avait-elle confiée.

Khalida Popal était présente lors du rassemblement en Jordanie. Selon elle, au moins cinq joueuses ont été agressées sexuellement dans leur chambre par deux responsables masculins, qui avaient été envoyés par l'AFF pour accompagner les joueuses. Dans un premier temps, les officiels invitaient les joueuses à venir dans leur chambre d'hôtel. 

« Ces hommes appelaient dans les chambres des joueuses et dormaient avec elles. Ils promettaient aux filles 112 euros par mois si elles disaient oui à tout. (...) Si une joueuse lève la voix, elle peut être tuée. »  Plusieurs joueuses seraient ensuite venues vers elle en larmes, tandis qu'une autre présentait une ecchymose au cou.

 

"Ces histoires sont fausses"

 

Aussitôt ces allégations de violences physiques et sexuelles dévoilées, la fédération afghane s'est empressée de démentir par la voix de son secrétaire général, Sayed Alireza Aqazada. « Aucun abus sexuel n'a été commis sur aucune fille de l'équipe nationale », a t-il juré. M. Agazada a aussi démenti l'information du Guardian selon laquelle l'équipementier danois Hummel avait coupé les liens avec la fédération à cause de ces allégations. Contacté, l'équipementier Hummel n'a pas souhaité répondre aux sollicitations de l'AFP.

Démenties ou pas, ces allégations ont choqué le président de l'Afghanistan, Ashraf Ghani. « C’est choquant pour tous les Afghans. Toute forme d’inconduite contre des athlètes, hommes ou femmes, est inacceptable. Je ne tolère aucune violence sexuelle », a tonné Ashraf Ghani dans un communiqué. « Je demande à M. le Procureur général de mener une enquête approfondie, conformément à nos codes juridiques », a-t-il ajouté, réclamant « la mise en place d’un cadre légal pour éviter de tels incidents dans nos fédérations sportives ». Il y a 4 ans, l'Afghanistan avait décidé de promouvoir le football féminin en lançant un championnat national. Mais en 2017, il a dû être annulé faute de financements. 

Arnaud Le Quéré