Interrogée sur l’état actuel de l’équipe de France féminine, Amandine Miquel livre une analyse lucide, teintée de nuances. Loin des discours triomphalistes, l'entraîneure de Leicester City - passée par le Stade de Reims - évoque une forme de stagnation et met en lumière les défis structurels qui persistent chez les Bleues.
Un "renouveau" à relativiser
Pour Amandine Miquel, parler de renouveau dans le contexte de l’équipe de France est peut-être un peu exagéré : "Ce n’est pas un changement radical", confie-t-elle. "On a modifié quelques éléments petit à petit, mais au final, ça reste assez similaire. On n’a pas vraiment franchi un cap majeur."
Une vision mesurée, mais révélatrice d’un constat partagé par plusieurs observateurs : les ajustements procédés ces dernières années ne portent pas encore leurs fruits : "La vraie question, c’est de savoir si les changements opérés auront un impact dans un court terme. La réponse n’est pas évidente."
Méritocratie vs continuité : un équilibre fragile
Au fil des sélections, certains choix ont surpris, notamment la nomination d’entraîneurs issus du football masculin, avec peu d’expérience dans le féminin. Une dynamique que Miquel observe sans la condamner.
Tout comme le renouvellement des joueuses, notamment via la méritocratie, qui revient régulièrement dans le débat public. Amandine Miquel reste prudente sur ce point : "Ce sont avant tout des choix d’entraîneur. Mais la question, c’est de savoir s’ils sont entièrement dictés par le terrain, ou s’il n’y a pas un certain équilibre à trouver, influencé par d’autres facteurs que l’on ne maîtrise pas forcément."
Un manque d’alchimie et de constance
Autre point soulevé par Miquel : l’irrégularité des performances tricolores et le déficit de cohésion observé sur le terrain. La chute de la France à la 11e place au classement FIFA en est, pour elle, un symptôme. "Ce n’est pas uniquement une question de mental", nuance-t-elle. "Il faut avant tout qu’il y ait un projet de jeu clair, adapté aux qualités des joueuses sélectionnées. Il faut de la continuité avec un projet précis et ne pas le modifier en permanence. Il faut renforcer la cohésion et le lien entre elles, ce que Bonadei tente de faire."
Elle insiste sur l’avantage de la sélection nationale par rapport aux clubs : la liberté de choisir ses joueuses.
Des exemples inspirants, mais un chemin difficile
Face aux modèles de réussite que sont l’Angleterre, l’Espagne ou les États-Unis, et leur capacité à décrocher des titres grâce à un travail acharné et une stratégie bien définie, Amandine Miquel répond avec un sourire : « Je ne suis pas sûre que ce soit facile, hein. »
Et quand on lui fait remarquer qu’en voyant les champions à la fin, cela peut donner l’impression que tout est simple, elle tempère aussitôt : « Oui, mais c’est surtout nous qui avons cette impression. Quand une équipe joue avec rigueur, travail et simplicité, ça paraît fluide, presque évident. Mais en réalité, c’est le fruit de longues années de construction, de cohérence et de stabilité. »
Derrière les titres et les paillettes, elle voit surtout des années de travail, une stratégie définie et une volonté de structuration à long terme. Une manière de rappeler que derrière la beauté d’un jeu maîtrisé, se cache toujours une exigence invisible.
Sélectionneure des Bleues un jour ? Peut-être... ou sinon ailleurs
Et si demain, le poste de sélectionneur des Bleues lui était proposé ? Là encore, Miquel fait preuve de prudence et d’enthousiasme: "Ce n’est pas un objectif en soi." Si l’occasion se présente, elle l’étudiera : "Si on m'appelle et qu'on pense que je peux apporter quelque chose de positif, je serai ravie de relever le défi. Mais si je ne suis pas contactée, je ne vais pas en être affectée."
Et de conclure avec sérénité : "L’objectif à terme reste d’entraîner une sélection et idéalement, de participer à une Coupe du Monde. Si ce n’est pas avec la France, ce n’est pas un problème. Je ne vais pas me vexer. J’étudierai toutes propositions et ferai mon choix en tout état de cause si l’opportunité venait à m’être présentée."
Photo : Leicester
