Le cinéma français met de nouveau à l'honneur le football féminin avec le film Une Belle Équipe. À l'écran, on retrouve Kad Merad, Céline Sallette ou Sabrina Ouazani dans une comédie qui sort ce mercredi en salles. Plongée dans l'univers du film, avec l'éclairage du réalisateur Mohamed Hamidi.

 

C'est l'histoire d'une parenthèse, une histoire improbable qui permet de parler du collectif, de « l'esprit d'équipe » et des rapports de genre dans notre société. Dans le village de Clourrières, situé dans le Nord de la France, l'équipe de football du SPAC risque de disparaître. Après une bagarre en plein match, tous les joueurs sont suspendus, ce qui hypothèque les chances de leur maintien « en dernière division ».

La solution ? Les remplacer par des femmes ! Une idée qui germe dans l'urgence alors que plus aucun homme n'est disponible pour terminer le championnat et sauver le club, soudain menacé de mettre la clé sous la porte. Elle est suggérée par Léa (jouée par Myra Tyliann) et fille du coach, Marco (incarné par Kad Merad). Figure tutélaire du football local, le coach Marco se montre réticent avant de rapidement basculer à son tour et de souscrire à la seule proposition sur la table.

Se lance alors une mission (presque) impossible pour maintenir en vie « son club », et quelque part la mémoire de ses propres exploits. Le film raconte cette « épopée » d'une équipe montée à la va-vite et qui va tenter de sauver sportivement le club, mais aussi redonner une âme à un village bercé par la nostalgie d'une époque révolue, 90 ans après la création du SPAC.

 

À contretemps de la Coupe du Monde

Le projet du film a évolué au fur et à mesure de sa production, avec notamment un changement de titre, des Footeuses vers Une Belle Equipe. Une maturation du projet qui est aussi passée par le choix de ne pas sortir le film au moment de la Coupe du Monde en juin dernier, alors que les Bleues enregistraient des affluences et des audiences TV record. Selon Mohamed Hamidi, réalisateur du film, l'objectif était notamment qu'Une Belle Équipe ne soit pas « perçu comme un film uniquement sur le foot », mais plutôt comme « un film plus sociétal ».

=> Une Belle Équipe : « Ce sont des anecdotes qui m'ont été racontées par les joueuses »

Alors que le film était déjà dans la boîte, Mohamed Hamidi a d'ailleurs vécu le Mondial « comme un vrai kif », se souvenant notamment du match d'ouverture France – Corée du Sud. Présent dans les tribunes aux côtés de ses enfants et de Jamel Debbouze, qui fait partie des producteurs d'Une Belle Équipe, il se souvient d'une « ambiance de folie » au Parc des Princes et bien évidemment du nom des trois buteuses tricolores dans ce match...

Comme nous l'expliquait le réalisateur (et co-scénariste du film), le football est donc un point de départ pour explorer, de manière plus générale, la question des relations hommes-femmes. Parmi ses sources d'inspiration, Mohamed Hamidi évoque sa famille et ses « six sœurs », majoritaire dans une fratrie/sororie composée de 9 enfants.

 

Le ballon rond, une passion en toile de fond

Pour Mohamed Hamidi, « les femmes apportent [régulièrement] des solutions » face à « des situations de blocage, [mais] on ne leur laisse pas souvent les commandes ». Une mécanique que le réalisateur voulait explorer « à travers quelque chose d'aussi fédérateur que le foot ».

Pourtant, le ballon rond n'est pas qu'un prétexte. Le réalisateur nous rappelle : « le foot, c'est une de mes passions. (…) Gamin, j'ai joué des heures et des heures », lui qui est originaire de Bondy, comme un certain Kylian Mbappé.

Le réalisateur fait d'ailleurs un clin d’œil à son ancien club de Pavillons-Sous-Bois en Seine-Saint-Denis. Les couleurs du Stade de l'Est ont inspiré celles du SPAC, l'équipe fictive créée pour les besoins du film. Des teintes sang et or qui font également référence au Racing Club de Lens, club emblématique du Nord, région dans laquelle Une Belle Équipe situe son action.

 

Se battre sur le terrain et dans la vie

Le film joue en permanence sur les préjugés, les clichés, avec une volonté de faire rire. Il décrit une situation ou un groupe de femmes se retrouve autour du football, non plus pour accompagner leurs maris, leurs pères ou leurs enfants, mais pour à leur tour vivre leur propre aventure, en sortant d'une situation vécue « par procuration ».

Jouer contre des équipes masculines n'est finalement pas un défi insurmontable comparé au partage des tâches ménagères (avec autant de post-it de rappel), retrouver le contact avec son enfant, ou tout simplement faire ses propres choix, sans attendre l'approbation de son mari.

Au fil de l'aventure, elles font chacune la démonstration de leur capacité à jouer les rôles occupés jusqu'ici par les hommes, alors que ces derniers ont plus de mal à se faire à cette nouvelle réalité. Déjà trésorière du club, Stéphanie (jouée par Céline Sallette) devient une présidente hyperactive, et Catherine (jouée par Laure Calamy) cherche quelque part à faire vivre l'héritage de son grand-père, « l'illustre » Lucien Tison-Marcel, fondateur du SPAC.

 

Un idéal collectif

En permanence dans le film, ce rappel est présent, avec une partie des personnages masculins qui tentent d'imposer un « retour à la normale » plutôt que de laisser l'aventure se poursuivre. Face aux difficultés, les mauvais résultats sportifs, un père dépassé face aux tâches domestiques et ses propres enfants, la tentation est la même et exprimée de manière de plus en plus exacerbée.

Construit sous la forme d'une comédie, Une Belle Équipe propose une voie pour la réconciliation entre les différents protagonistes du film, un terrain d'entente au sens propre comme au figuré. Derrière le football, Mohamed Hamidi veut faire l'éloge du collectif, des grandes familles aux bandes de copains, dans lesquels les femmes, avec ou sans ballon, doivent avoir toute leur place.

 

=> Une Belle Équipe : Aurélie Meynard, à la rencontre de la ''vraie'' coach du SPAC

 

Photo: Roger Do Minh - Quad Films - Gaumont - Kissfilms

Hichem Djemai