Le Tournoi de France organisé dans les jours à venir à Calais et Valenciennes sera l'occasion pour le public de voir d'assister à des matches (amicaux) de haut niveau, 9 mois après la Coupe du Monde, dont six matches s'étaient joués au Stade du Hainaut. Pour les Bleues et Corinne Diacre, c'est aussi l'occasion de tourner la page du Mondial, ses déceptions, avec des évolutions forcément attendues dans le jeu et les prestations proposées par l’Équipe de France.
Les longs mois qui ont séparé ce Tournoi de France du dernier rassemblement des Bleues en novembre ont peut-être été l'occasion de prendre de la distance, après une année 2019, à la fois riche et décevante pour la sélection tricolore.
Les critiques ont fusé depuis le dernier Mondial, aussi bien à l'extérieur qu'en interne de l'équipe de France. En quelques mois, Corinne Diacre a essuyé des polémiques impliquant Eugénie Le Sommer, Wendie Renard ou plus récemment Gaëtane Thiney, trois joueuses qui comptent plus d'une centaine de sélections, et qui ont chacune à leur manière, marqué l'histoire récente des Bleues.
Organisation tactique, management, vie de groupe, des fondamentaux au cœur du débat, et une manière de dire que le boulot n'est pas fait, restait désormais à trouver la ou les responsables. La tempête n'est pas complètement passée, mais pour le moment l'équipe de France doit se résoudre à composer avec un casting pratiquement inchangé, aussi bien sur le terrain que sur le banc.
Gaëtane Thiney, retour en grâce avant retraite forcée
Cette nouvelle année s'ouvre pourtant avec un choix remarqué de Corinne Diacre qui écarte Gaëtane Thiney après en avoir fait l'un des piliers de sa sélection. Depuis la SheBelieves Cup 2018, Thiney s'était imposée comme l'option privilégiée de Diacre dans ce rôle de pointe avancée du milieu, positionnée dans l'axe derrière l'avant-centre (Valérie Gauvin, le plus souvent).
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Si Thiney partageait souvent cette zone avec Eugénie Le Sommer (qui rentrait depuis le côté gauche), elle incarnait bien ce « numéro 10 » que les supporters français aiment retrouver au cœur du jeu. Des questions se posent autour de ce choix d'écarter Thiney, à la fois en terme de profil (faut-il un numéro 10 en équipe de France ?) mais aussi en terme de timing (vu les déclarations récentes et critiques de Gaëtane Thiney vis-à-vis de Corinne Diacre).
La sélectionneuse des Bleues a balayé l'hypothèse de la « punition » en conférence de presse, expliquant avoir pris sa décision au mois de novembre dernier, et qu'elle en avait alors discuté avec Thiney, arguant des performances en berne depuis le Mondial. Une explication qui semble cohérente à la fois avec ce que l'on a pu voir en D1, Gaëtane Thiney étant effectivement moins influente dans le jeu du Paris FC, et des matches des Bleues à l'automne, dans lesquels Thiney a obtenu un faible temps de jeu.
Majri avance, un nouveau rôle pour Le Sommer ?
Un choix qui intervient conjointement avec le replacement d'Amel Majri, désormais effectif aussi bien en club qu'en équipe de France. Après avoir évolué au poste de latérale, la gauchère lyonnaise évolue désormais au poste d'ailière, et déjà avec réussite comme en témoigne son triplé face à la Serbie en novembre.
Avec Majri un cran plus haut, la logique serait de voir Eugénie Le Sommer replacée dans l'axe, dans un rôle de deuxième attaquante axiale, de « neuf-et-demi » ou d'électron libre, un poste hybride qui pourrait correspondre aux nombreuses qualités de l'attaquante lyonnaise. Cette solution pourrait par exemple ressembler à ce que l'on a pu voir en Angleterre dans l'utilisation de joueuses comme Fran Kirby ou Nikita Parris.
Pourtant, Corinne Diacre a jusqu'à présent privilégié des profils de milieux de terrain dans cette zone, avec de multiples tests à ce poste (avant de choisir d'installer Thiney), ou plus récemment avec Kenza Dali. Un équilibre à trouver notamment pour permettre à l'équipe de France de se montrer performante sur le plan offensif dans les grands rendez-vous.
Geyoro et Karchaoui ont gagné du terrain après le Mondial
Dans cette recherche du bon équilibre au milieu, une joueuse semble enfin avoir obtenu sa chance. Très peu utilisée pendant le Mondial, Grace Geyoro a été systématiquement titularisée depuis, prenant la place laissée vacante avec la retraite internationale d’Élise Bussaglia.
Trajectoire similaire pour Sakina Karchaoui, qui engrange du temps de jeu après avoir souvent observé la Coupe du Monde depuis le banc. La latérale montpelliéraine qui vit d'ailleurs une situation paradoxale, puisqu'elle accède au poste de titulaire en latérale gauche des Bleues, alors qu'elle joue de plus en plus souvent dans un poste de milieu de terrain excentrée à Montpellier (avec Inès Belloumou en latérale).
Autant de glissements plutôt que de véritables révolutions dans le jeu tricolore. Privée de Jeux Olympiques cette année, l'équipe de France aura donc l'occasion de travailler plus discrètement pendant les mois à venir. Cela passe notamment par ce Tournoi de France, organisé dans le Nord pour prolonger la dynamique du Mondial. Les Bleues vont se mesurer à trois équipes (le Brésil, le Canada et les Pays-Bas) qui seront présentes au Japon cet été pour les Jeux.
Quelles pistes explorer en vue de l'Euro ?
Reste que la pression qui pèse déjà sur Corinne Diacre pourrait limiter sa capacité à procéder à de véritables expérimentations. En témoigne d'ailleurs le faible nombre de changements dans son groupe par rapport aux précédents rassemblements. Ouleymata Sarr et Estelle Cascarino font ainsi leur retour dans le groupe tricolore, après y avoir déjà figuré par le passé.
Autre élément, la proximité du choc entre le Paris Saint-Germain et l'Olympique Lyonnais en D1. Un match programmé le 14 mars prochain, et qui suscite la polémique en raison de la proximité de la rencontre au sommet et les tournois internationaux de ces prochains jours (notamment la SheBelieves Cup aux États-Unis, qui concernent plusieurs internationales des deux équipes).
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Dans ce contexte, Corinne Diacre devra nécessairement se montrer prudente dans l'utilisation de ces joueuses, comme elle s'y est d'ailleurs engagée. Par ailleurs, nul doute que les Parisiennes et Lyonnaises présentes pour cette compétition amicale (on en retrouve dans les quatre équipes qui disputeront le tournoi) seront forcément prudentes en amont de ce choc au sommet.
Des ingrédients potentiellement corrosifs pour la sélectionneuse des Bleues. Si Corinne Diacre ne semble pas en danger dans l'immédiat, elle porte désormais sur ses épaules la difficulté durable de l'équipe de France à bien figurer dans les grands rendez-vous. Si l'Euro 2021 est encore loin, avec une campagne de qualification encore en cours (et une double-confrontation attendue face à l'Autriche), ce Tournoi de France sera l'occasion d'un premier état des lieux pour la sélection tricolore et ses ambitions en vue des échéances à venir.
Photo: Antonio Mesa / FFF (Entraînement des Bleues au Stade des Costières de Nîmes, le 5 octobre 2019)
Tournoi de France – Le programme du tournoi
Mercredi 4 mars 2020
France – Canada (Calais, 17h)
Pays-Bas – Brésil (Valenciennes, 19h)
Samedi 7 mars
Canada – Pays-Bas (Calais, 19h)
France – Brésil (Valenciennes, 21h)
Mardi 10 mars
Brésil – Canada (Calais, 19h)
France – Pays-Bas (Valenciennes, 21h)
Hichem Djemai