C'était une conférence de presse particulière ce matin pour Corinne Diacre, sélectionneuse de l'équipe de France, et dont le départ est ouvertement pronostiqué face aux critiques de plus en plus virulentes d'une partie de ses cadres. Après l'interview donnée par Amandine Henry dimanche pour le Canal Football Club, la réponse de la technicienne tricolore était évidemment attendue, au-delà de la liste des 23 annoncée par Corinne Diacre.
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Particulière également avec le contexte sanitaire actuel. Après avoir été infectée par le COVID-19 le mois dernier, Corinne Diacre a fait le choix d'annoncer sa liste, depuis chez elle, alors que la coach des Bleues le faisait habituellement depuis l'auditorium de la FFF à Paris. Un dispositif qui rendait l'annonce de cette liste moins solennelle, alors que la sélectionneuse tricolore avait choisi de faire une déclaration préalable pour donner son point de vue sur la situation de l'équipe de France.
Un texte lu par Corinne Diacre où elle reconnaît être sous pression, avec cette question rhétorique « Peut-elle tenir ? » en parlant d'elle-même, et d'assurer « qu'elle n'avait jamais été aussi motivée » pour assumer son rôle de sélectionneuse et atteindre l'objectif « de qualifier notre équipe nationale pour le prochain championnat d'Europe ».
« Pas le moment » de « régler les problèmes »
Derrière son exigence de « bonne attitude générale » et de « sérénité » pour le prochain rassemblement, Corinne Diacre cherche à reporter à plus tard les éventuels mises au point et réunions qui pourraient se tenir au sein du groupe tricolore. Un agenda de fait contradictoire avec celui proposé par Amandine Henry, et le président de l'OL Jean-Michel Aulas.
La sélectionneuse des Bleues estime que « ce n'est pas le moment » de « régler les problèmes », avant d'obtenir la qualification pour l'Euro 2022, et notamment d'assurer un résultat positif face à l'Autriche. Une victoire le 27 novembre au Roudourou qualifierait les Bleues pour le tournoi en Angleterre.
Pour Corinne Diacre, ces discussions ne pourront donc avoir lieu que plus tard, et renvoie également la responsabilité d'organiser une éventuelle réunion au président de la FFF, « mon patron », Noël Le Graët. Selon la sélectionneuse tricolore, Le Graët « n'a pas émis le souhait de faire cette réunion, en tout cas pas pour le moment », tout en précisant qu'elle était « soutenue par [le] président et par des joueuses ».
« Entre quatre murs »
De fait, Corinne Diacre ne semble pas emballée par une réunion au sommet, qui de fait, pourrait remettre en question ses méthodes de travail et son autorité sur le groupe tricolore. C'était d'ailleurs l'une des questions que l'on pouvait soulever après l'interview d'Amandine Henry, qui parlait d'une réunion qui puisse inclure « toutes les joueuses ». Quelle serait le périmètre choisi étant donné que c'est Corinne Diacre qui choisit son groupe de rassemblement en rassemblement ?
Une méfiance également vis-à-vis de la presse, refusant « des querelles de personnes », et le fait « d'utiliser les médias comme intermédiaire », préférant à l'inverse que « les problèmes [soit réglés] les yeux dans les yeux » . La sélectionneuse des Bleues explique notamment que son discours face à ses joueuses à Clairefontaine sera différent de celui tenu ce jeudi face aux journalistes, en espérant que les propos tenus devant son groupe resteront « entre quatre murs ».
Une différenciation qui semble illusoire, mais qui semble être dans l'immédiat le moyen utilisé par Corinne Diacre pour tenter de contenir les polémiques. L'expression « choix sportif » utilisée en conférence de presse pour évoquer la non-sélection d'Amandine Henry le mois dernier, ou encore ses déclarations post-Coupe du Monde sur TF1 concernant le positionnement d'Eugénie Le Sommer avaient nourries des polémiques mais aussi une certaine hostilité vis-à-vis de Corinne Diacre et de ses choix.
« Si on doit venir pleurer en équipe de France, il ne faut pas venir »
Tout en repoussant à plus tard les discussions sur les problèmes en interne de l'équipe de France, Corinne Diacre a notamment répondu par moment à Amandine Henry, en récusant l'idée d'une sanction vis-à-vis de sa capitaine : « Tout le monde a pris ça comme un affront […] C'était simplement une décision du moment. » Et de confirmer ensuite que la milieu de terrain lyonnaise conserverait le brassard de capitaine, « pour le moment »...
Au sujet des joueuses évoquées par Amandine Henry, « pleurant dans leur chambre » pendant la Coupe du Monde 2019, Corinne Diacre a réfuté ce tableau estimant que « ce n'est pas le cas de la majorité des joueuses », et que cela concernait « une ou deux joueuses » qui ont « manifesté » des « craintes » ou « un sentiment de tristesse ». Le journal L’Équipe a notamment évoqué ce jeudi le cas de la Parisienne Grace Geyoro, dont le temps de jeu avait été particulièrement limité lors de la Coupe du Monde 2019 (7 minutes, avec deux entrées en fin de match).
Parmi les piques de la sélectionneuse tricolore, on peut également citer ce passage de sa déclaration préalable dans lequel Corinne Diacre explique que « toutes, nous avons à prouver que la France peut gagner un titre. Ce que nous n'avons jamais fait. Et nous avons ça en commun ». Un message à peine voilé aux joueuses tricolores de l'Olympique Lyonnais, une équipe qui domine durablement la scène européenne dans les compétitions de clubs.
Le décor semble donc posé avant ce rendez-vous face à l'Autriche. Reste à savoir si les joueuses de l'équipe de France adhéreront au scénario proposé par Corinne Diacre, avec cette idée de se qualifier d'abord pour l'Euro 2022, régler les problèmes ensuite. Les premiers signes/éléments de réponse seront scrutés dès lundi lors du regroupement des Bleues à Clairefontaine, peut-être bien plus que ce qu'il se passera sur le terrain...
Photo: Guillaume Bigot/FFF
Hichem Djemai