Après le match nous sommes revenus avec Christophe Parra sur le match et la victoire de l'OM face au PSG. L'occasion pour le coach olympien de parler de sa vision du jeu, et de l'esprit qui selon lui doit habiter la pratique du football y compris au plus haut niveau.

 

« Ce qu’on se disait avec les filles avant le match, c’était de bien positionner ce match-là par rapport à l’essence même du sport et du football, (...) de chercher des émotions comme on peut avoir (...) dans une cour de récréation. Et c’est en fait ce qu’on a essayé de rechercher aujourd’hui, de retrouver cette émotion-là qu’on peut avoir quand on est tout gamin. Et je pense que voilà, c’est pour ça qu’on fait du sport, c’est pour ça qu’on joue au football et c’est vraiment extraordinaire à vivre.

Bon c’est sûr que le côté cartésien des choses, la façon dont on prépare un match, le plan de jeu, c’est aussi sûrement ce qui nous a permis de gagner. Mais vivre de telles émotions et aller les chercher au plus profond de soi-même et essayer de titiller, d’éveiller un petit peu l’émotion, c’est assez fabuleux à vivre.

(…) Au niveau du plan du jeu, on avait essayé de bien préparé ce match-là en réduisant les espaces, les intervalles. On avait beaucoup visionné les matches et on a beaucoup travaillé. On l’a beaucoup préparé, peut-être pas plus que les autres et peut-être avec plus de concentration et d’attention et c’est vrai que les filles ont vraiment réalisé sur le plan intellectuel et cognitif un match extraordinaire.

« Rappelons que nous sommes des promus »

Oui, battre une des meilleures équipes françaises et une équipe qui est encore en Ligue des Champions et à qui je souhaite beaucoup de réussite dans cette compétition, c’est vrai que c’est extraordinaire. Rappelons que nous sommes des promus. Rappelons aussi que certains nous voyaient redescendre en D2 lorsque l’on a eu une passe un petit peu compliqué où il fallait s’adapter à ce niveau-là en début de saison.

On va pas faire de l’autosatisfaction, c’est pas du tout dans mes habitudes mais voilà, ça montre bien qu’en sport, il faut être patients. Il faut bosser, il faut travailler, le mot travail, même s’il déplaît à beaucoup, en tout les cas pour moi il est important. C’est vraiment une belle réussite pour le travail, l’investissement des filles, et aussi pour le club. On était peut-être loin d’espérer en début de saison battre le PSG.

« Quand ça fonctionne c’est fabuleux »

J’ai compris beaucoup de choses depuis quelques jours. Des fois, j’ai du mal à comprendre certaines attitudes dans le milieu et je m’en suis éloigné pour cette raison-là. Mais j’ai essayé de réfléchir et de trouver aussi de l’énergie et de l’essence et je reviens à ma cour de récréation. Je suis aujourd’hui dans une cour de récréation.

Vivre ces moments-là qui sont quand même extraordinaires et quoi de plus beau que de vivre de ta passion et d’essayer et de t’entourer de personnes qui ont la même philosophie, la même pensée et la même envie d’avancer donc quand ça fonctionne c’est fabuleux. Mais on sait très bien qu’on aura aussi des périodes difficiles et on sait aussi que dans ces moments-là, on sera critiqués, montrés du doigt, ça fait partie du système. Mais quoi qu’il en soit on peut pas enlever le travail réalisé par les filles et ce fabuleux moment qu’on peut vivre aujourd’hui.

On sort d'une période de trois semaines sans matches pour l'OM, entre la trêve internationale et la Coupe de France. Est-ce que cela vous a donné le temps de bien préparer ce match et de pouvoir tenir 90 minutes face à une équipe comme le PSG ?

La beauté du sport fait que y’a pas de vérité. Y’a une alchimie à trouver. Et l’alchimie d’aujourd’hui, on sait très bien que ce sera pas l’alchimie de demain. Je parlais d’émotion, je parlais aussi du côté cartésien des choses. Le sport finalement, il y a un côté cartésien mais à un moment donné, il s’arrête. Il y a des paramètres qu’on peut pas forcément maîtriser. Moi j’avais plus d’interrogations sur notre capacité à tenir 95 minutes en ayant pas eu de compet’ durant ces semaines-là.

On a essayé de le préparer d’une certaine façon. (…) [Après], c’est aussi ça la beauté du sport. c’est essayer de réfléchir, de mettre tous les atouts de son côté, d’appréhender au mieux une compétition. Est-ce que c’était la meilleure formule ? Peut-être, mais c’était quand même pas évident de pouvoir se dire 95 minutes contre Paris sans compet’, moi j’avais beaucoup d’interrogations à ce niveau-là, mais bon, il faut croire que je me suis trompé.

Vous avez été surpris, en positif, par ce qu'ont réalisé vos joueuses aujourd'hui ?

Pas surpris, parce qu’on vit avec tous les jours. C’est quand même, fort heureusement le travail qu’elles peuvent faire. Donc surpris, non. Mais y’avait quand même des interrogations sur cette capacité à pouvoir lutter intellectuellement avant de parler d’aspect physique aussi et d’avoir cette lucidité par rapport au jeu déployé par le PSG avec une capacité à passer sur les côtés, à jouer à l’intérieur avec Cruz et Boquete toujours bien placées.

Et donc, est-ce qu’intellectuellement, on allait trouver les ressources et ouvrir les bons tiroirs pour continuer à les bloquer, c’était un petit peu là le point d’interrogation que j’avais mais il faut croire aussi que les émotions permettent aussi d’apporter une énergie à certains moments qui te permet de te dépasser.

Par moments, on a vu votre équipe reculer, mais finalement les joueuses ont réussi à ne pas se faire enfermer dans leurs trente derniers mètres...

Je peux vous assurer que le plan de jeu a été respecté à la perfection. La perfection n’existe pas, excusez-moi pour le terme. Elles ont un tantinet (...) reculé en deuxième mi-temps. Un tantinet (...) mais on le savait aussi, on s’est préparés pour ça. Mais bon, quand même, on peut pas être trop dur avec elles. Je pense que même si dans certaines situations, ça aurait pu nous mettre en difficulté mais y’a toujours une fille qui a compensé. Franchement, bravo à elles encore une fois.

Des victoires face à Juvisy, Paris. Vous avez bientôt un match contre Montpellier. Ce sont des matches que vous pouvez jouer libérés, un peu comme des matches bonus, des matches de gala ?

C’est un jeu. Ça reste un jeu, il faut rester ancré là-dedans. C’est aussi le charme du football féminin même si je cherche pas à l’opposer à quoi que ce soit, le ballon est rond pour tout le monde, bien évidemment. Mais c’est important de rester ancré dans ce domaine du jeu, de trouver l’énergie, les ressources nécessaires. On veut me parler de « Classico », moi je veux bien si ça plaît aux journalistes de parler de « Classico ».

Mais bon, moi je suis heureux de rencontrer Patrice Lair qui est certainement un des meilleurs éducateurs de football féminin. Je suis heureux de rencontrer des joueuses de très haut niveau, peut-être les meilleures joueuses au monde. Et voilà de pouvoir vivre ces moments-là, ça reste extraordinaire et c’est pour ça qu’on fait du sport et faut pas l’oublier et j’insiste bien là-dessus. N’oubliez pas !

Hichem Djemai